Retour sur le Congrès 2007

La vidéo du Congrès 2007, qui réunit près de 80 CTs le 30 mars dernier, est en ligne. L’occasion de revenir sur cette journée et d’en tirer, non pas des conclusions mais des ouvertures pour le futur…

Bref recadrage, pour ceux qui n’y étaient pas...

Sur le thème « coach de pouvoir, pouvoir du coach », le dernier Congrès s’est déroulé en 4 phases :

  • Un jeu en matinée, animé par des professionnels du jeu de rôle. Il s’agissait de faire émerger les rapports de forces entre différentes provinces et corporations d’un pays imaginaire, afin d’en identifier le prochain leader, suite à un putsch. Les règles du jeu étaient nombreuses et complexes.
  • Un temps de partage et de restitution de l’expérience vécue, juste après le lunch ;
  • Des ateliers d’approfondissement l’après-midi, animés par des personnes de pouvoir : avocat, homme politique, psychanalyste, philosophe, théologien, coach. Vous entendrez sur la vidéo une synthèse des temps forts de chacun de ces ateliers.
  • Une analyse de la journée écoulée par les animateurs d’ateliers.

 

Que retenir de ce grand jeu de pouvoir ?

En capitalisant sur les réactions à chaud lors des restitutions, sur les grilles d’analyse proposées en fin de journée par les animateurs d’ateliers, ainsi que sur les appréciations encore reçues par e-mail dans les semaines suivantes, et avec le recul que permettent trois mois écoulés, nous voudrions proposer une relecture de cette expérience, à différents niveaux de sens.

1. Au niveau opérationnel

Pour qui en douterait encore, le déroulé a mis en évidence, une fois encore, l’importance d’un temps de restitution au terme d’une expérience apprenante : alors que les frustrations étaient palpables en fin de matinée, tout le groupe était regonflé à bloc à 14h...

2. Au niveau fonctionnel

Le jeu du matin constituait une excellente métaphore des jeux de pouvoir et des réactions au changement au sein d’une entreprise. La diversité des réactions manifestées parmi nous (adhésion, rejet, critiques, passivité, etc.) reflétait bien le spectre de réactions observables chez nos clients face à un contexte nouveau et inattendu. L’occasion pour nous, agents de changement, de vivre de l’intérieur cette fameuse résistance…

3. Au niveau du pouvoir

Le jeu comportait de nombreuses frustrations, liées à son caractère hautement normatif et quantitatif. En outre, l’animation en était confiée à des professionnels externes. Le pouvoir avait changé de mains…

Face à ce changement subi et contraint, les réactions ont été diverses et contrastées. Trois grandes tendances se sont dessinées :

  • L’enthousiasme : pour certains, l’énergie était très forte. La complexité des règles leur plaisait, la perspective de gagner les excitait.
  • la résistance passive : décrochages, mises en retrait, conciliabules critiques, participation « en meta », l’air de ne pas y toucher, etc.
  • la résistance active : des protestations se sont élevées au sein des équipes (« on ne peut pas faire des choix uniquement sur ces critères, prenons le temps de réfléchir au sens de la décision à prendre… »). Il n’y a cependant pas eu aucune tentative de transformation du jeu, que ce soit par l’humour, la créativité ou la pose de limites. Pas de putsch, hormis celui du jeu lui-même ! Nos enfants rebelles se sont tus.

À chacun de nous de se retrouver dans ce tableau, et de reconnaître la manière dont nous utilisons ou pas notre pouvoir pour gérer nos frustrations.

Le questionnement peut s’approfondir sur deux plans :

  • quelle utilisation de mon pouvoir individuel ?

Que fais-je de mon pouvoir personnel lorsque je ne suis plus conforté par ma posture de coach ? Comment est-ce que je réagis quand les règles deviennent trop compliquées, voire complexes? Quand je ne comprends plus bien où l'on veut en venir ? Suis-je capable de lâcher prise? De jouer le jeu? Ou dois-je être dans la maîtrise de tout, tout le temps?

Nombreux participants ont dit s’être sentis en énergie basse : « trop de consignes », « cauchemar individuel », « perte de sens », « perte d’identité, en tant que CT » « mon cerveau s’est arrêté, je ne comprenais rien », « j’ai renoncé », « dites-moi ce que je dois faire », « auprès de qui dire « stop » ?

  • quelle utilisation de notre pouvoir collectif ?

Quel pouvoir du groupe sur l’individu ? Pourquoi les nombreux participants en retrait n’ont-ils pas organisé un contre-pouvoir ? Etait-ce une question de temps ? La perception d’une démission collective a été telle que lors du debriefing, la comparaison avec la guerre 39-45 a été faite, provoquant de nombreux remous (mouton ou résistant ? Psychiquement c’est comme cela que le fascisme se construit !!)

4. Au niveau identitaire

Le jeu nous a bousculé dans nos habitudes de coachs et de CTs. Les animateurs ne partageaient pas notre ECM. Les règles du jeu faisaient la part belle aux critères de valorisation quantitatifs, et laissaient peu de place dans la décision aux valeurs et au sens. Très loin de notre culture CT, tout cela !

Il n’en fallait pas beaucoup plus pour transférer sur ces animateurs la responsabilité de nos frustrations. Les restitutions furent éloquentes à ce point de vue : « les 4 animateurs ont pris le pouvoir sur le groupe ; le pouvoir était aux mains des « hommes en blanc », etc.

Ici aussi, le questionnement peut s’approfondir sur deux plans :

  • Externalisation de la frustration

Même un jeu comporte des règles. Ce jeu était-il « excessivement » normatif, comme reproché par certains participants, ou simple reflet des réalités de la vie ? Il était certes complexe, et nous, les coaches CT, avons été mis face à cette complexité. Avons-nous projeté notre frustration sur l’extérieur, sur les animateurs ?

  • Repli identitaire

Hors de la culture CT point de salut ? Certains commentaires ont suggéré que le jeu était « indigne des CT ». La dénonciation du caractère « non CT » du jeu a pris une telle force que lors du debriefing qu’en fin de journée, une des animatrices d’atelier, psychanalyste, a exprimé (Dominique Padé, à voir à la fin de la vidéo) avoir été « scotchée » par la violence des commentaires et le rejet de la différence qu’ils traduisaient. Méfions nous de la fermeture, et entraînons-nous à l’ouverture à d’autres cadres de référence, même lorsque nous n’y sommes pas préparés….

 

Voilà quelques uns des renvois d’images, aussi provocants que potentiellement apprenants, que nous laisse ce beau Congrès 2007…